Le Sapphire, nouveau spectromètre de masse sur la plateforme PARI

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Photo 1 : Le Sapphire de Nu Instruments, installé en novembre 2020 à l’Institut de physique du globe de Paris (crédit : Service communication IPGP).

La plateforme d’analyses haute résolution (PARI) située à l’Institut de physique du globe de Paris (IPGP/Université Paris Cité) vise à caractériser les matériaux et à en déterminer les compositions élémentaires et isotopiques en s’appuyant sur des équipements de pointe (https://www.ipgp.fr/la-recherche/plateformes-de-recherche/pari/). Elle permet de répondre à de très nombreuses questions scientifiques, qu’il s’agisse de l’étude des intérieurs planétaires, celle des risques naturels et celle des processus de surface. Elle permet également d’étudier l’origine de la vie et du système solaire, et d’aborder des questions scientifiques relevant de nombreux autres domaines tels que l’archéologie ou la médecine par exemple.

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Photo 2 : Photo du plasma du Sapphire (crédit : Service communication IPGP)

Parmi les équipements de pointe nouvellement arrivés sur PARI, on trouve un spectromètre de masse multicollecteur à source plasma équipé d’une cellule de collision/réaction (CC-MC-ICPMS), le Sapphire de la compagnie Nu Instruments. Cet équipement a été financé à parts égales par l’IPGP et par la région Ile-de-France à travers le DIM ACAV+ (Domaine d’Intérêt Majeur Astrophysique et Conditions d’Apparition de la Vie). Installé en novembre 2020, il a été utilisé jusqu’à présent principalement pour la mesure des compositions isotopiques du Ca et du K. En effet, l’utilisation d’hydrogène et d’hélium dans la cellule de collision/réaction, associée à la réaction d’échange de charge puis de proton entre l’argon et l’hydrogène, permet d’éliminer le très large faisceau d’40Ar+ ainsi que les argides qui sinon produiraient des interférences isobariques avec certains isotopes d’intérêts (e.g., 40Ar+ sur 40K+ ou 40Ca+, 38ArH+ sur 39K+ ou encore 40ArH+ sur 41K+).

Couplé à l’Apex Oméga et surtout grâce à la mesure en basse résolution, le Sapphire apporte un gain en sensibilité de plus d’un ordre de grandeur pour les mesures isotopiques du Ca et du K (>1000V/ppmCa et ~ 2000V/ppmK) comparé aux études sur MC-ICPMS classiques. Les variations isotopiques dépendantes de la masse (rapports 40Ca/44Ca, 42Ca/44Ca et 43Ca/44Ca) et les anomalies isotopiques (e.g., production du 40Ca par désintégration du 40K) peuvent être déterminées de manière juste et avec une précision meilleure que 100 ppm (2 sd) dans des solutions à seulement 100 ppb de Ca (Dai et al., Chem. Geol. 2022). Pour le potassium, une précision de 50 ppm (2 sd) est atteinte pour la mesure des compositions isotopiques stables du K (rapport 41K/39K) dans des solutions à 25 ppb de K (Moynier et al., Chem. Geol. 2021 ; Moynier et al., JAAS 2021).

Les fractionnements isotopiques stables du K sont étudiés pour tracer des processus cosmochimiques, géologiques et biologiques tels que les processus d’évaporation/condensation, les processus magmatiques, la formation du noyau terrestre, l’altération ou encore le métabolisme cellulaire. Quant aux compositions isotopiques du Ca, elles sont utilisées pour tracer des processus biologiques et géologiques, mais aussi dans des buts de datation 40K-40Ca (demie vie de 1.2 Ga). Par ailleurs, le gain en sensibilité décrit précédemment permet de réduire drastiquement la quantité d’échantillons nécessaire à une analyse fiable, ouvrant la voie à l’étude de petits échantillons et/ou d’échantillons très peu concentrés, jusque-là non mesurables ou techniquement très contraignants. Ceci nous a notamment permis d’être sélectionnés pour mesurer les compositions isotopiques du Ca et K des échantillons de l’astéroïde Ryugu rapportés par la mission japonaise Hayabusa 2 (e.g., Moynier et al., GPL 2022).