La vitesse de déplacement des grains de sédiment dans les rivières et en particulier des plus gros d’entre eux n’est pas bien documentée à l’heure actuelle. La technique la plus aboutie est de marquer des cailloux (peinture, marqueurs magnétiques, par ex.). Après quelque temps, on tente de les retrouver à l’aval de leur point de marquage, ce qui est déjà un challenge en soi. On en déduit une loi de vitesse pour les cailloux retrouvés. Si cette technique est valable pour des échelles de temps de quelques années, sa validité à des échelles plus grandes est inconnue. Nous avons utilisé le ¹⁰Be pour estimer ces transports « long-terme », le long d’une rivière du nord du Chili qui a constitué un laboratoire idéal. En effet, elle s’écoule le long d’un canyon de 56 km de long. De plus, une formation géologique particulière et relativement ponctuelle se trouve à son entrée, si bien qu’il est possible de connaitre la distance parcourue dans la rivière par les cailloux qui proviennent de cette formation précise. Nous avons ainsi montré que les cailloux sont transportés d’un bout à l’autre du canyon en un temps variable de quelques siècles à > 100.000 ans. La distribution des vitesses ne respecte pas exactement le comportement diffusif attendu et, notamment, certains galets peuvent mettre bien plus de temps que prévu. Nous avons montré que la loi obtenue est similaire à celle documentée ailleurs sur le court-terme (galets marqués), et montre notamment la même dépendance en fonction de la taille des galets à la virgule près. Nous avons aussi fait avancer la science en prouvant dans le premier cas réel l’adage populaire selon lequel les petits cailloux se déplacent bien plus vite en moyenne que les gros.  

Carretier S., V. Regard, L. Leanni, et M. Farías 2019. Long-term dispersion of river gravel in a canyon in the Atacama Desert, Central Andes, deduced from their 10Be concentrations. Scientific Reports 9 : 1–12.

https://doi.org/10.1038/s41598-019-53806-x