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Offre de thèse : Déchiffrer la dynamique des magmas et des cristaux dans les plomberies magmatiques alcalines par des contraintes pétrologiques et magnéto-telluriques

Le BRGM et l’ISTO s’associent sur un projet de thèse pour proposer des interprétations croisées de données géophysiques et pétrologiques sur les réservoirs magmatiques. Les réservoirs nourrissant le volcanisme alcalin des volcans des Iles Canaries, Mayotte et de l’Erebus sont visés.

Identifier la présence et le taux de fusion des magmas sous les volcans actifs constitue un défi majeur pour comprendre comment les systèmes volcaniques se préparent à de nouvelles éruptions. Malheureusement, l’intérieur des volcans reste insaisissable pour des observations directes et on doit se fier à des approches indirectes incluant la géophysique, la pétrologie et les études de terrain des produits éruptifs. L’état de l’art nous dit que les éruptions volcaniques sont rares et la plupart (c’est-à-dire 80 à 100 %) des magmas restent piégés en profondeur, formant ainsi des réservoirs magmatiques. Là, les magmas se refroidissent et se fractionnent, produisant des magmas évolués et riches en gaz qui pourraient entrer en éruption de manière explosive. Malgré leur rôle critique dans le stockage et la différenciation des magmas, la nature, l’état et la distribution crustale des réservoirs magmatiques, depuis leur région source profonde jusqu’à la surface, restent méconnus. La part de mystère augmente pour les racines profondes du système de plomberie magmatique où les basaltes parentaux sont produits, car l’échantillonnage géologique est impossible et/ou les sondages géophysiques sont, à ce stade, généralement incapables de capturer quantitativement les propriétés du magma profond. Ces limitations entravent notre compréhension des processus peu profonds et restreignent considérablement notre capacité à les modéliser.

L’objectif de ce projet de thèse est de déployer une nouvelle méthodologie, combinant pétrologie expérimentale et techniques magnétotelluriques, permettant de visualiser et de décrypter l’état physique d’un réservoir magmatique en définissant, en temps quasi-réel, sa fraction de liquide. Cette méthode sera appliquée aux systèmes volcaniques de Mayotte et des îles Canaries afin d’identifier des réservoirs magmatiques potentiels isolés et de proposer une vue complète du système de plomberie magmatique opérant sous ces systèmes actifs. La récente éruption sous-marine de Mayotte est un exemple opportun car en 2018-2019, plus de >5 km3 de magma ayant une composition intermédiaire (cad. à température intermédiaire entre les magma les plus chauds, 1250°C, et les plus froid, 900°C) a été émis à 50 km à l’est de l’île de Mayotte. Il s’agit de la deuxième plus grande éruption « basaltique » historique après la célèbre éruption du Laki (1783-1784). D’une certaine manière, nous pouvons également mentionner l’éruption récente mais moins volumineuse de La Palma en 2021, où les magmas intermédiaires émis pendant cet événement sont restés cachés aux services de surveillance locaux pendant des décennies et leur réactivation soudaine a causé de nombreuses pertes matérielles. Ainsi, la principale question à résoudre sur ces systèmes est de savoir s’il existe encore des réservoirs actifs potentiels contenant des magmas plus évolués et donc explosifs qui peuvent être réactivés dans un future proche.

Wawrzyniak et col. ont imagé par méthode dite magnétotelluriques, un grand corps conducteur (électrique) à une profondeur d’environ 25 km sous l’île de Mayotte. Il contient potentiellement 100-400 km3 de magma. Cela s’applique également aux îles Canaries au Teide et sous La Palma où des données récentes de MT suggèrent la présence de corps conducteurs volumétriques importants à des profondeurs ≥15 km pour les Canaries. Cependant, l’acquisition de données MT est loin d’être terminée et une partie des objectifs du doctorat sera d’étendre les données existantes actuelles à des conditions plus profondes, en acquérant des données MT profondes sur terre et en les traitant. En particulier, des données de magnétotelluriques de longue période doivent être collectées et traitées afin d’imager les racines magmatiques profondes, jusqu’à la limite lithosphère-asthénosphère (cad 80 km). Pour interpréter avec précision ces signaux géophysiques, il faudrait 1) définir expérimentalement les conditions de stockage et d’évolution des magmas sur ces sites volcaniques (profondeur- température et détermination de la quantité d’eau des magmas) et 2) mesurer en laboratoire la conductivité électrique des magmas de Mayotte et des Canaries, qui à ce jour est mal contrainte. Ces points ont été partiellement explorés par l’équipe d’encadrement, cependant, pour une meilleure résolution, il serait nécessaire pour le doctorant d’étendre les données existantes à des conditions P-T plus élevées (jusqu’à 1300ºC, 25-60 km). Cela implique aussi de cartographier la ligne d’évolution compositionnelle reliant les magmas basanitiques primaires aux phonolites évoluées de ces systèmes au cours du refroidissement dans la plomberie magmatique. Les nouvelles données expérimentales seront mathématiquement régressées afin de fournir de nouveaux algorithmes géothermobarométriques (par exemple, l’évolution de la composition de l’olivine avec le P ; la teneur en Melt-Mg avec les cristaux T-%) permettant de contraindre les conditions de cristallisation et d’évolution sur ces sites (Travail ISTO). Enfin, le doctorant sera en mesure de développer une modélisation directe des résultats expérimentaux et de MT précédents, afin de convertir le modèle pétrologique de différenciation magmatique pour chaque système en un profil électrique en fonction de la rhéologie P-T-H2O-magma (Travail BRGM).

Profil recherché:

Nous recherchons une(e) candidat(e) motivé(e) à travailler sur des méthodes nouvelles pour l’imagerie et la compréhension des plomberies magmatiques. Des compétences en pétrologie des roches magmatiques ou des compétences en géophysique (eg. méthodes magnéto-telluriques) seront requises. Un savoir-faire en expérimentation haute-pression ou en calcul numérique pour les géosciences sera un plus.

Direction de thèse:

Fabrice Gaillard (gaillard@cnrs-orleans.fr);

Co-encadrant: Pierre Wawrzyniak (P.Wawrzyniak@brgm.fr) & Juan Andujar (juan.andujar@cnrs-orleans.fr)

Date limite de candidature:

Le 26 avril via le site ADUM: https://www.adum.fr/